Le Zoo de Vincennes

Bénabar
Le rhinocéros du zoo de Vincennes
Sa peau est une écorce qui craquelle, il traîne
Licorne monstrueuse aux paupières de terre glaise
Mastodonte de peine sans espoir de remise
Vieillard, un enclos de béton vieux
Vieille gloire, un hospice de banlieue
A l'étroit piégé dans le zoo de Vincennes
Une baleine noyée dans les eaux de la Seine
Quel chagrin, quel triste monde
Oí¹ la savane se fane í  l'ombre
De la fausse montagne du zoo de Vincennes
Dans ce minable safari domestique
Oí¹ míªme le roi de la jungle abdique
Loin de la savane et des vastes plaines
Le lion est un vieux beau í  bedaine
Crinière en calvitie, derrière son grillage
Il ne tourne míªme plus comme un lion en cage
A quoi bon encore jouer les bíªtes féroces
Quand on ne fait míªme plus peur aux gosses?
Quel chagrin, quel triste monde
Oí¹ la savane se fane í  l'ombre
De la fausse montagne du zoo de Vincennes
Sous la volière des rapaces résignés
Regardent en l'air sans plus rien espérer
A côté les simagrées des singes sans gíªne
Et un petit train que les enfants dédaignent
Un couple d'éléphants piétine d'ennui
Aux défenses d'ivoire inutiles et ternies
Pour essayer d'atténuer la déprime qui les gagne
Faudrait un Lexomil gros comme un pain de campagne
Quel chagrin, quel triste monde
Oí¹ la savane se fane í  l'ombre
De la fausse montagne du zoo de Vincennes
Est-ce que chez eux, les enfants d'Afrique
Vont visiter des parcs zoologiques
Pour voir enfermées des bíªtes qui viennent de loin
Des chats, des pigeons, des horodateurs ou des chiens?
Le zoo de Vincennes, sinistre fíªte foraine
Arche de Noé de banlieue parisienne
Curieuse ménagerie triste et funèbre
Oí¹ les animaux s'emmerdent
Quel chagrin, quel triste monde
Oí¹ la savane se fane í  l'ombre
De la fausse montagne du zoo de Vincennes
Dire que j'en suis l'indigène